Interview / Floki 6.50, le premier bateau construit en fibre de bambou

Antoine Mainfray est architecte naval, à la tête de son cabinet Atelier Interface. Après des essais dans l'utilisation de matériaux biosourcés pour la construction de voiliers de plaisance, il a développé un Mini 6.50 en fibre de bambou.

Des débuts dans la construction de bateaux de course

Antoine Mainfray a fait ses débuts dans la construction navale dans le milieu de la course au large. Il a notamment travaillé sur le Volvo 70 Groupama 4, l'IMOCA de Jean-Pierre Dick Saint-Michel Virbac ou encore l'avant-dernier IMOCA Hugo Boss (NDLR : Aujourd'hui 11th Hour Racing), des Ultimes, des Class C et même l'Hydroptère. Avant de lancer son activité de construction navale – en parallèle de son métier d'architecte naval – en 2016.

"Je me suis rendu compte de l'impact écologique désastreux de la construction de bateaux de plaisance et de course, au niveau des matériaux utilisés et du cycle de vie des bateaux", nous explique-t-il.

Le Floki 6.50
Le Floki 6.50

Le premier bateau construit en fibre de bambou

En juin 2021, il mettra à l'eau le Floki 6.50, un Mini 6.50 proto et premier bateau complètement réalisé en sandwich de bambou. Un matériau qu'il avait déjà partiellement utilisé sur ces premiers modèles de voiliers de plaisance, l'Aloès 18 et le Flow 19, construit en CP époxy et dont les safrans et le roof sont en bambou.

"J'ai testé toutes les autres alternatives à la fibre de verre et la fibre de carbone qui existent actuellement : le lin, le chanvre la fibre de basalte. Le lin et le chanvre sont des fibres naturelles assez intéressantes d'un point de vue écologique, mais ont des caractéristiques mécaniques qui ne permettent pas de faire des bateaux performants, en raison d'un poids important. Ce sont des fibres pertinentes pour les bateaux de plaisance, mais pas adaptées aux bateaux de course. Le basalte, ce n'est finalement pas si écologique puisqu'il s'agit d'un minerai chauffé à haute température. Ce n'est pas du matériau recyclé ni recyclable, pas plus que la fibre de verre" détaille Antoine.

Si le bambou est un peu plus lourd que la fibre de carbone, "mais acceptable sur un bateau dédié à la performance, c'est une fibre naturelle qui possède des caractéristiques mécaniques suffisamment élevées en regard de sa propre densité et au regard d'un composite fini pour pouvoir être utilisé de manière pertinente sur un Mini 6.50."

Panneaux de bambou pour le Floki 6.50
Panneaux de bambou pour le Floki 6.50

Des résines biosourcées, une âme recyclée

Le bateau actuellement en construction à La Rochelle possèdera donc une coque, un pont et des structures faites à partir de panneaux sandwich de bambou. Les renforts locaux seront eux en carbone.

Pour les résines, Antoine a utilisé les mêmes que sur ces autres voiliers, "une stratification au contact avec de l'époxy biosourcé et une résine d'infusion biosourcée."

La mousse d'âme du sandwich est en PET recyclé et recyclable en fin de vie du bateau. "De la même manière que la résine biosourcée, ça permet de moins puiser dans les ressources."

Si l'idée n'est pas de créer un bateau "vert", l'objectif est néanmoins d'avoir un bateau "moins sale."

"L'objectif est de réduire la consommation de matière première pendant toute la phase de construction, et de générer moins de déchets aussi. Les chutes de tissus non utilisés restent du végétal."

Le Floki 6.50
Le Floki 6.50

Une première participation à la Mini Transat 2023

Le Floki 6.50 est un scow à bouchain vif avec une carène en forme développable et une étrave avec une marotte, comme sur les Fireball ou les Caravelles. Ce premier modèle a su séduire un premier client qui participera à la Mini Transat 2023 à son bord. Antoine cherche également des financements et partenaires pour pouvoir lancer la construction d'un second exemplaire et lui aussi se lancer dans un projet de Mini Transat.

"Le bambou peut être utilisé pour la construction de bateaux plus grands. Plutôt des bateaux pour la plaisance rapide ou la course-croisière. Ça pourrait se faire en Class40, car les bateaux sont fabriqués en sandwich de fibre de verre, mais pas en IMOCA."

Il est également possible d'acheter les plans du Floki 6.50 pour la construction amateur, mais pas en fibre de bambou, qui demande des connaissances et un savoir-faire particulier.

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