Grégory Godard est un menuisier-charpentier passionné de bateaux. Cette passion, il en a hérité de son papa aujourd'hui décédé. Son papa et lui entretenaient un projet, racheter un bateau rouillé et le restaurer, pour lui redonner son luxe d'antan.
Il y a quelques mois, sur les réseaux sociaux, Grégory, papa de 2 enfants tombe sur une annonce proposant de racheter pour une bouchée de pain un bateau, le Viking joy III. Grégory entrevoit alors la possibilité d'être fidèle à la promesse faite à son papa.
Surprise historique
C'est en mettant la main sur le bateau et montant à son bord qu'il éprouvera une surprise pour le moins épatante. Ce bateau, dont la coque en acajou a été vernie, qui a passé 7 ans dans l'eau du port de Rouen sans aucune attention ni entretien et qui a un trou béant dans la bordée bâbord est un bateau qui a participé à la victoire des alliés en juin 1944 !
Viking joy III est, effectivement, un Jboat, appellation générique de bateaux surtout utilisé par les polices portuaires américaines, dont environ 145 exemplaires ont été construits et dont, jusqu'à la trouvaille du Dieppois, il ne restait aucun exemplaire. Celui-ci fait partie de la série J960, de bateaux à faible tirant d'eau.
Bateau fabriqué aux USA par le créateur des Higgins Boat
Ce bateau, fabriqué par les chantiers Higgins aux Etats Unis, a été vu par certains dans le port d'Anvers, en Belgique. C'est ce même chantier qui créa les fameux "Higgins Boat", à propos desquels le Président Dwight D. Eisenhower déclara à l'historien Stephen Ambrose : "Il [Andrew Higgins ndlr.] est celui qui a remporté la guerre pour nous. Si Higgins n'avait pas créé et fabriqué ces bateaux, nous n'aurions jamais été en mesure de débarquer en Normandie. La stratégie de victoire de la guerre aurait été fondamentalement différente de même que son issue."
Le J-974, numéro de série du bateau de Grégory, est une vedette de 36 pieds, construit pendant la guerre et livrés entre juin et juillet 1943. Il fait partie d'une commande de 29 bateaux passée par l'US Army [Et non, chose exceptionnelle, l'US Navy comme on s'y attendrait]. Il a été, peu de temps après sa livraison, expédié en Europe.
La vie de ce bateau, nous laissons Grégory la conter "En 1967, il a subi des transformations majeures. Une cabine a notamment été ajoutée. La plus importante, insensée pour moi, a été de vernir l'intégralité de la coque d'acajou. De l'eau a fini par s'infiltrer entre la coque et le vernis". Heureusement, plus de peur que de mal, c'est ce que le propriétaire nous explique : "j'ai examiné la coque et n'ai décelé aucune trace de champignon, le bois a honorablement vécu son traitement sévère. Les œuvres vives sont à reprendre pour le moins, la plupart à refaire. Il y a un trou considérable dans le bordée bâbord. Mais rien qui ne soit réalisable, avec de l'huile de coude."
Retour à l'état militaire
A propos de réfection, si à l'origine le charpentier envisageait de remettre en état de plaisance son bateau, il aimerait, aujourd'hui, lui redonner son état d'usage militaire. Il a, à dessein, besoin de l'aide de toute la communauté nautique. Du reste, après que certains de nos confrères locaux aient parlé de sa découverte, il a découverte la générosité des Marins : "je suis agréablement surpris d'avoir reçu des messages de France, de Belgique, et même des États Unis. Beaucoup d'encouragement pour retaper le bateau bien sûr, mais aussi des photos, des dessins et des informations extrêmement détaillées. Un de mes contacts m'a parlé du plan original du bateau notamment. Je vais rassembler l'ensemble et faire en sorte de ne pas trahir ce bateau."
Grégory envisage d'utiliser ce bateau pour parler de la guerre. "A Dieppe, nous avons subi les bombardements et les peines de la guerre. Je fais partie de cette génération bercée par le jour le plus long et je voudrais voir mes enfants connaître cette partie de l'histoire de la ville. Ils auront, de surcroît, l'occasion de la toucher du doigt cette histoire, je suis heureux de pouvoir leur apporter ça avec ce bateau" explique-t-il.
Un projet nautique d'envergure pour le menuisier, hyper motivé à jouer le détective, l'historien et le chercheur pour son bateau.
A propos, quel est le prochain projet nautique de Grégory ? "Je vais passer le permis bateau. Je pourrais dire que je pilote un bateau de la Seconde Guerre Mondiale !"
A la recherche de bonnes volontés et d'informations
De valeur historiquement inestimable, Grégory fait, aujourd'hui, appel à toutes les bonnes volontés pour à la fois retracer l'histoire de son bateau et pour le retaper. "Le bateau est à Rouen, la première chose à faire est de le ramener vers mon atelier, à Dieppe. Cela ne peut se faire que par la route, il n'est pas en état pour naviguer. Et sa coque est fragile aussi. L'avoir à côté de mon atelier me permettra de mieux le refaire, j'aurais à portée de main tout l'outillage nécessaire. Le bois, c'est mon métier."
Disposez-vous d'informations sur ces J Boat conçus par Higgins ? Une astuce ou une possibilité de soutenir Grégory pour déplacer son bateau ou le refaire ?
Venez nous en parler sur yacht-Club, nous suivrons ensemble l'avancée de cette extraordinaire rénovation !