D'ébéniste à constructeur de bateaux
Jean Morin est né en 1927 dans la région bordelaise. Après des études d'ébénistes, il se lance à son compte dans la fabrication de volets roulants. En 1959, il est démarché pour construire le Mousse, un dériveur en contreplaqué de 3,90 m dessiné par Eugène Cornu en 1952. Pour l'anecdote, son atelier est si exigu qu'il est obligé de percer le mur qu'il partage avec son voisin pour construire le mât du bateau… Il déménage alors à Pessac pour monter un atelier sur une parcelle de terrain cédé par son père.
Il se verra ensuite confier la construction de plusieurs bateaux, dont le Corsaire (plan Herbulot de 5, 50 m) dont il construira 1550 exemplaires, et qui connaitra un véritable succès.
Une rencontre décisive
Mais c'est sa rencontre avec André Cornu lors du Salon Nautique de 1962 qui va bouleverser sa vie. L'architecte lui confie les plans d'un dériveur double de 4,70 m qu'il vient de dessiner et qui se place entre le 420 et le 505. Quelle aubaine lui qui rêvait – à l'image de son concurrent Lucien Lanaverre qui construit depuis 1960 le 420 – de fabriquer son propre dériveur !
Le premier quat' sept voit le jour au printemps suivant, mis à l'eau sur le bassin d'Arcachon. À l'été 1963, le dériveur est présenté aux différents clubs de voile et le succès est immédiat ! Le bateau sera rapidement construit en série ; la première année, 100 unités seront construites ; en 1970, 10 par jour !
Régater pour faire connaitre le 470
Pour faire connaitre son bateau, Jean Morin participe à de nombreuses régates avec Jean-Claude Cornu, le fils d'André Cornu et fin régatier. L'homme est d'ailleurs champion du monde de 505. En 1964, le duo participe à l'épreuve "Un par Série" qui consiste à comparer différents dériveurs. La même année, la Fédération Française de Voile (qui ne s'appelle pas encore comme ça à cette époque) en fait une classe nationale. Les deux hommes s'illustrent par leurs performances sportives, en national comme à l'internationale, décrochant trois titres de champions de France et termineront d'ailleurs 3e du premier Championnat d'Europe en 1966.
Un succès international
L'architecte André Cornu décide de faire évoluer son bateau et Jean Morin de refaire de nouveau moule. Le marché se développe à l'export et dès 1966, d'autres chantiers européens sont autorisés à fabriquer le 470.
Jean Morin continue néanmoins à produire de nombreux exemplaires de son bateau – jusqu'à 1500 bateaux par an – à un tarif accessible séduisant les plus grands régatiers français. Ils sont nombreux d'ailleurs à avoir navigué en 470 : Michel Briand, les frères Pajot, les frères Follenfant, les frères Peponnet !
Jean Morin construit également d'autres bateaux, le Mini Morin qui vise à remplacer l'Optimist, le 4 m ou encore le 430 mais qui n'auront pas le succès escompté.
Une fin de carrière en tant que promoteur immobilier
En 1976 – année qui voit le 470 devenir série olympique – Jean Morin rend les armes. Il cède son chantier à Yachting France (qui rachète par la même occasion le chantier Lanaverre) et devient promoteur immobilier. Il cesse son activité dans les années 90 ans, à presque 70 ans. Il s'est éteint ce mardi 9 mars 2021 à l'âge de 93 ans.