Quel est le bateau que vous avez dessiné et dont vous êtes le plus fier ?
C'est la réponse impossible. À chaque fois on y met quand même de soi. C'est difficile de faire un classement. Même si j'ai beaucoup aimé travailler sur les derniers projets.
Le Django 12.70 en collaboration avec Pierre Rolland. L'Explocat 52, il y a eu un alignement des astres pour faire ce projet dont je suis très fier. Il y a aussi les voiliers que j'ai fait avec Bord à Bord.
Ce sont des expériences enrichissantes qui construisent demain. C'est difficile de choisir un seul bateau. Il y a peu de projets que l'on a envie de cacher.
Mais mon plus beau projet c'est mon Samba 24, un voilier de course-croisière que j'ai dessiné et construit tout seul avec un ami. Je l'ai encore aujourd'hui et je suis ému de voir mes enfants naviguer dessus. Ils sont très fiers, c'est un véritable ciment dans la famille.
J'ai mis 2 ans à le construire, ce n'était pas facile, et je navigue toujours avec. C'est le bateau que je connais le mieux. J'y suis attaché de manière différente que tous mes autres projets. Sur ce projet de construction, j'ai mesuré l'ampleur de la tâche. Je pense que je n'en construirais pas d'autres. Ce bateau, c'est le début de l'histoire.
Cela n'empêche qu'il y a beaucoup de projets qui nous construisent. C'est une frise ininterrompue. On ne peut pas distinguer les choses. Les projets d'aujourd'hui nourrissent ceux de demain.
Au-delà du professionnel, il y a des liens qui se créent pour chaque bateau.
Quel bateau auriez-vous aimé dessiner ?
Un cargo de transport à voile type Grain de Sail ou TOWT. Ce sont des projets intéressants. C'est précisément à la jonction entre nos deux savoir-faire, la voile et le bateau professionnel.
Après il y a pleins de bateaux, beaux par leur réalisation, dans quasiment chaque domaine, que l'on aurait aimé dessiner. Il faut faire un choix et l'on mise sur les deux savoir-faire de l'agence. On va certainement avoir le projet d'un bateau de pêche à voile, mais ça murit depuis longtemps.
À l'époque j'aurai été contacté par TOWT, j'aurai été très content de le faire. La voile est un des moyens les plus écologiques et économiques de se déplacer. C'est parfait pour remplacer les énergies carbone. La voile est assez magique. Il faut faire des progrès. Il faut mettre à l'épreuve des modèles qui n'existent pas encore.
Quel est le projet sur lequel vous auriez aimé travailler ?
Je travaille sur un bateau de voyage rapide. On a fait plusieurs bateaux de voyage par le passé, notamment avec Pierre Rolland, mais ils n'ont jamais été portés par des chantiers. Ça a toujours été des projets à l'unité.
C'est quelque chose qui m'intrigue le voyage aujourd'hui, dans le monde dans lequel on vit, avec la dernière année que l'on vient de connaitre. Comment on voyagera après ? Est-ce qu'on ira dans les mêmes destinations ? Le temps consacré sera le même ? Est-ce qu'on naviguera toujours à la voile ? Le bateau de voyage à moteur à ses limites en termes de carburant.
Le bateau de voyage c'est une réflexion qui m'anime pas mal. On a réfléchi un peu dessus. Dans notre métier, on n'invente jamais. On propose un arrangement de choses qui existent déjà et l'innovation est une portion. On crée un cocktail innovant de propositions qui existent déjà.
Pour les bateaux professionnels, on ne peut pas s'aventurer dans les mers avec des solutions bancales. Il faut que ce soit "Sea proven". Quelque chose qui a fait ses preuves.
Il y a une demande d'être conservateur ou méfiant à l'égard des évolutions révolutionnaires qui 'n'ont pas fait leurs preuves. Je pense que celui qui propose quelque chose de nouveau à une connaissance plus ou moins profonde de ce qui s'est fait avant. On s'inscrit dans la continuité. On est en réflexion là-dessus et j'espère que le projet se concrétisera bientôt. Je pense qu'on a une vision à proposer à l'agence un peu différente de ce qui est proposé aujourd'hui.
Je n'ai pas la prétention de faire quelque chose de nouveau, mais des propositions nouvelles. Les générations se renouvellent et on reste ancré dans ce qui nous a marqués à une certaine époque de la vie. La notion de la grande croisière, la découverte dans un monde où il suffit de cliquer sur son téléphone pour voir l'embouchure d'un fleuve, découvrir un animal, ça mène à réfléchir.
Le Covid me fait réfléchir. Aller voyager pour voir, ne pas avoir quasiment plus de justifications qu'une simple curiosité. Comment on voyagera dans les 20 prochaines années ? Le voyage n'est pas nécessairement de partir au bout du monde. La France possède un littoral magnifique.
Cette réflexion sur le voyage et le déplacement, je la trouve particulièrement intéressante. Notamment avec les inventions, l'électricité qui se développe de plus en plus dans le nautisme, l'autonomie… C'est un beau cocktail.