Souvenir de nav' / Récit d'une victoire sur le Trophée Marie-Agnès Péron par Hugo Picard

© Simon Jourdan - Winches Club

Hugo Picard - plus connu sous le pseudo de The Sailing Frenchman - navigue sur le circuit Mini, dans la catégorie des bateaux de série. Alors qu'il s'était fixé un objectif de Top 5 sur le Trophée Marie-Agnès Péron, course en mer d'Iroise et Bretagne Sud, au départ et à l'arrivée de Douarnenez, il a finalement décroché la victoire en série.

Il y a une dizaine de jours, j'arrivais à Douarnenez pour prendre le départ de la dernière course de la saison : le Trophée Marie Agnès Péron.

Un record en guise de préambule

J'ai passé quelques jours à naviguer dans la baie, profitant de l'occasion pour embarquer quelques amis, dont Jack de Sailing Virgins et son amie, mais aussi Romain, qui était venu naviguer plusieurs semaines avec moi sur l'Écume de Mer Ann Alé dans les Caraïbes. Au passage, on va battre le record organisé dans la baie par la Classe Mini.

On complète les 15 milles nautiques du record de la Déferlante à plus de 10 nœuds de moyenne. Lla déferlante est une app destinée aux ministes, différents parcours sont disponibles tout le long de la cote et chacun peut tenter sa chance quand il le souhaite en se servant de son téléphone comme balise tracker pour enregistrer la performance.

Mauvais départ vite rattrapé sur le Trophée Marie-Agnès Péron

Le 15 octobre à 13 h locale, nos 50 minis passaient la ligne de départ au près dans une dizaine de nœuds de vent. Je prends un départ médiocre, mais en partant second rideau, je peux virer rapidement pour aller vers les risées sur la droite du plan d'eau. Ça paye ! Je rattrape mon retard et me rapproche du paquet de tête. Je passe la bouée de dégagement dans les 10 premiers. Le spinnaker max, que j'avais préparé avant le départ, puis terminé de gréer sur le dernier bord, claque à la bouée de dégagement.

Le bateau prend de la vitesse et rapidement un grain gagne sur la baie et le vent monte. Kiraucassis part au surf, la quille et les safrans en résonnance avec des pointes à plus de 15 nœuds. Je me retourne et vois une rafale faire partir une dizaine de mini au tas, comme une bourrasque dans un champ de blé, les minis ploient, mais ne cassent pas.

Le vent se renforce et les bateaux tracent !

Je sors rapidement de la baie, on passe le Raz de Sein, nous sommes en grande marée (plus de 100 de coef) et le courant contre nous. Qu'à cela ne tienne, nos puissantes machines lancées sous spi déboulent quand même à presque 10 nœuds, malgré au moins 5 nœuds de courant de face. Le vent forcit encore alors que nous cravachons à travers la baie d'Audierne pour enrouler la pointe de Penmarch.

Rapidement, je n'arrive pas à tenir mon grand spi, trop puissant. Il me faut être à près de 110 degrés du vent réel et je fais trop de départs au tas pour être performant. J'irais plus vite et plus stable sous Code 5 (un plus petit spi, plus plat).

En moins de 3 minutes, le spi max est affalé et le code 5 en tête ; Kiraucassis repart de plus belle. Je garderais ce plan de voile jusqu'à la jument des Glénan ou je repasse sous GV et génois seul pour mettre le cap vers le nord de Groix.

Je suis toujours dans les 5 premiers, mais deux Maxi ont réussi à s'échapper et sont loin devant, avec au moins 3 milles d'avance.

Une nuit tranquille

Je repasse sous gennak en arrivant à Groix, puis sous spi max pour descendre jusqu'au phare des Birvideaux, avant de remettre le gennak pour entamer la remontée vers la chaussée de sein. Il est environ 1 h du matin, j'ai réussi à faire une petite sieste de quelques minutes entre les Glénan et Groix.

Maintenant que le bateau marche bien, la mer est relativement plate, j'en profite pour aller m'allonger. Je fais 3 siestes de 20 minutes, entrecoupées par un petit tour sur le pont pour régler les voiles et regarder autour de moi. En milieu de nuit le vent prend de la droite et je repasse sous spi max. Au petit matin, le classement n'a pas trop évolué et on est maintenant au portant VMG, qui n'est pas l'allure préférée des Maxi, car trop de surface mouillée quand le bateau est à plat. Les Pogo 3 en profitent pour grignoter l'avance que nous avions prise au reaching pendant le début de la course.

Suivre les risées pour conserver le cap

Le vent faiblit à mesure que je m'approche de la chaussée de Sein. Heureusement une fois la cardinale passée, le courant nous entraine vers le Nord, quand la route vers la Basse du Lis est-nord-est. D'abord au près, je suis au coude à coude avec Anne Claire Le Berre, une excellente navigatrice et ancienne Olympiste. Je suis toujours très impressionné par ces marins qui en connaissent des wagons en réglage et sont des monstres à la barre. Heureusement j'arrive à m'accrocher alors que le vent tombe et prend de la droite. J'envoie rapidement mon petit gennak. Très plat et bien taillé par la voilerie HSD, j'arrive à le porter très haut. Il me donne un petit avantage en puissance sans presque rien perdre en cap.

Au contact des deux leaders

Maintenant, il y a plus de courant que de vent. Le premier nous entraine vers le Nord quand la prochaine marque, la basse de la vieille, est au sud-est. Le vent devient très instable. Je m'attache à suivre les risées, en essayant de conserver un minimum de vitesse. L'avance des 2 leaders, déjà bien entamée pendant le dernier bord, est en train de tomber. Je suis au coude à coude avec JM Jezequel et Hugo Dhallenne. Ce dernier a pris une option sur la gauche et s'est fait emporter par le courant vers Brest (ce que je ne savais pas à ce moment-là, je le pensais déjà rentré dans la baie).

Premier des bateaux de série ?

Pas à pas, nous arrivons près de la dernière marque de parcours, Basse vieille. Je suis une belle risée, un dernier virement pour me décaler et je sors mon petit gennak. Je peine à passer la bouée, 0,5 nœud, puis 0,3 nds… La baie de Douarnenez est en train de se vider et dans le goulet ou nous sommes il y a au moins 2 nœuds de courant. Avec un petit plus de puissance grâce à mon gennaker et beaucoup de chance, je passe, doucement certes, mais je parviens à rentrer dans la baie. Derrière moi, la porte se referme et il leur faudra plus d'une heure pour parvenir à passer cet obstacle invisible.

Il fait nuit noire, le vent est encore très faible et j'essaye de rester le plus concentré possible. Il suffit que je tombe dans un dévent, un effet de site ou autre pour me retrouver bloqué et voir mes poursuivants me dépasser juste devant la ligne. En voyant Fabio en prototype à 2 milles devant moi, je comprends aussi qu'il y a une chance pour que je sois le premier bateau de série dans la baie. Alors je décide de tirer des bords en milieu de baie, certainement moins performant que d'aller chercher des zones avec moins de courant sur les extérieurs, mais je préfère assurer le coup et marquer mes concurrents.

Victoire en série !

Quelques heures plus tard, je passe la ligne, premier série et second au général. Cette victoire est complètement inattendue. Je m'étais fixé un objectif de top 5 pour cette course, alors premier ! J'ai la chance d'être accueilli sur le ponton par le pôle de la Turballe et quelques amis, je ne réalise pas complètement ce qui m'arrive.

J'ai fait une bonne course, mais JM et Hugo ont largement mené la danse. Je n'ai réussi à revenir que dans les derniers milles, quand la pétole a rebattu les cartes.

Bref, vraiment content de finir la saison de course 2020 comme cela, maintenant c'est parti pour les entrainements d'hiver.

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