Malheureusement fermé suite à des éboulements depuis début 2021, le canal de Corinthe reste un endroit hors-norme dont on espère la réouverture. Récit d'une navigation sur cette voie d'eau atypique.
Mais où est l'entrée du canal ?
En provenance d'Athènes, c'est donc par la mer Égée que nous sommes arrivé pour passer le canal de Corinthe. Protégés par les vallons dont les sommets portaient encore de la neige en ce mois d'avril, nous avancions sans apercevoir l'entrée, nichée au fond du golfe. Mais où peut bien se cacher l'entrée du canal ? Armé de nos jumelles, nous voyons la terre se rapprocher, mais toujours aucun passage nous permettant de traverser la montagne.
Ce n'est finalement qu'à quelques milles que nous avons découvert le fameux passage, barricadé par une grande barrière jaune et noire. Pour rallier l'entrée est, baptisée Isthmia, il faut d'abord vous diriger dans la baie nord-ouest de Kenkhreon Kolpos. Il faut se rapprocher au plus près de la tour de contrôle du canal pour apercevoir l'entrée. En été, compte tenu du Meltem — vent puissant de la méditerranée orientale — le trafic se fait principalement dans ce sens.
Arrêt au stand obligatoire
Avant de traverser, il faut s'acquitter des frais de passages et s'adonner aux formalités administratives. Il faut s'amarrer le long du quai côté sud. Si celui-ci est protégé par de larges pare-chocs en caoutchouc, sa hauteur ne permet pas de bien protéger votre coque. Il faudra donc installer le maximum de pare-battage à bâbord pour préserver votre bateau.
Les bateaux d'une taille supérieure à 25 m doivent appeler la tour de contrôle pour demander un bateau-pilote, à bord duquel ils effectueront les formalités douanières.
Un droit de passage onéreux !
Pour les plaisanciers, il suffit de rejoindre le bureau du port pour les formalités. Il faudra remplir le document réservé aux particuliers et payer le droit de passage. Sachez que le canal de Corinthe est l'un des plus chers au mile au monde. Les bateaux sont taxés en fonction de leur longueur, leur pavillon et leur typologie — bateau privé ou charter. Sans oublier d'ajouter la TVA de 23 %. Ainsi, les bateaux jusqu'à 9 m payent 80 € HT.
Pour chaque m supplémentaire et jusqu'à 15 m, le tarif est de 23 €. Pour un bateau de 12 m comme c'était le cas pour nous, il faut payer 189,89 € TTC. On pourra s'en acquitter par carte bancaire ou en cash.
Attention, le canal est fermé tous les jeudis de 6 h à 18 h pour les réparations liées à l'effritement de la roche et les opérations de dragage.
On attend le signal !
Une fois la paperasse achevée, il faut désormais patienter. Le passage dans le canal se fait de manière alternative, il n'y a pas la place de se croiser. On attend donc que les uns sortent, mais surtout puisque l'on traverse en convoi, il faut attendre d'être assez nombreux. L'attente peut durer jusqu'à 3 heures, ce qui n'était heureusement pas notre cas.
Attention aux gros navires qui arrivent de l'autre sens. L'eau qu'il pousse peut venir à rompre les amarres. Il vaut mieux dans ces cas-là faire des ronds dans l'eau à l'entrée de la baie. Éviter le petit port au côté nord, celui-ci n'offre aucun quai pour s'amarrer.
C'est à notre tour !
On commence à voir nos voisins de pontons s'agiter. Nous allons pouvoir y aller ! La VHF est allumée sur le Canal 11 et nous entendons finalement, "Hermès 3, go !"
À la suite des autres — généralement 3 ou 4 bateaux —, nous défaisons nos amarres et avançons lentement en direction du pont submersible. Depuis 1988, ces deux barrières qui disparaissent totalement sous l'eau permettent de réguler le trafic : le pont de Poseidonia à l'ouest et à l'est, le pont d'Isthmia.
Un immense tunnel de calcaire
C'est assez magique de se retrouver dans cet étroit tunnel — malgré ses 25 m de large, les traces de peintures ornant les roches sont nombreuses. Les immenses roches de calcaires culminent à près de 80 m de haut et nous nous sentons bien petits.
Attention, un courant de 1 à 3 nœuds agite la mer, et ce dans les deux sens, en fonction de la direction du vent. La bascule se fait généralement tous les 6 heures, avec une pause d'une heure entre chaque bascule.
La vitesse maximale est de 7 nœuds et c'est donc prudemment que nous avançons, à la queue leu, leu. Une petite veste réchauffe nos peaux privées de soleil par les montagnes rocheuses.
Attention si vous suivez un navire à passager, le sillage de ses hélices produit vite un effet de machine à laver !
On est de l'autre côté !
Au terme d'un peu moins d'une heure de traversée, nous apercevons la deuxième barrière — Posidhonia côté ouest — et la mer Égée qui s'ouvre à nous ! Ainsi s'achève cette traversée qui nous aura transportés le temps d'une après-midi dans un monde de roche et de mer.