Bien sûr, rien ne remplace la navigation : ni celle des skippers émérites, ni la vôtre, plaisanciers de cœur. Mais quand voguer n'est pas au programme, le multimedia, le ludique et le participatif peuvent habilement l'évoquer… Pour preuve, la Cité de la Voile Eric Tabarly de Lorient !
La mer en face…
Côté immersion, c'est immédiat : le sas qui sert d'entrée à la cité est tapissé d'écrans géants. Trois, en fait, qui couvrent 120 m2 au total, et vous entourent, et vous emmènent comme en pleine mer. Bienvenue à bord d'un trimaran de 60 pieds ! Au cœur des belles images tournées entre Lorient et Groix, il vous faut, vous-même, naviguer, en vous déplaçant dans la grande pièce, pour varier les points de vue... La bande-son est efficace : le vent siffle dans les haubans et claque dans les voiles ; l'eau frappe la coque, ruisselle le long de la ligne de flottaison, gicle sous forme d'embruns… Vous y êtes, oui, sur l'océan, et du matin au soir puisqu'en sept minutes, vous parcourez le cadran : aurores puis aubes, sans fin.
Un bateau, kézako ?
Voilà le décor planté : la mer. Pour les bateaux, rendez-vous au premier étage. Certes vous en savez déjà beaucoup sur eux, mais d'autres points de vue s'avèrent intéressants. Le tactile par exemple : tous doigts dehors, vous tâtez les matériaux dont sont fait les bateaux… ici, c'est permis de toucher, et même encouragé ! Caresser, par exemple, les quilles de diverses formes, colorées, lisses, vernies même, délicatement posées sur le parquet de la Cité… jamais on ne peut le faire, n'est-ce pas ? Jamais non plus, on ne peut effleurer le galbe d'un foil noir en restant au sec. Rarement encore, on peut tâter les différentes textures des voiles dans un seul mouvement : des mini trinquettes en fibre de carbone, en Cuben Fiber, en Kevlar, en Pentex, en Dacron, et en nylon ne demandent qu'à être froissées. Des tranches de mâts en carbone, de coques, des cordages… sont aussi à toucher à volonté !
Regarder au-delà…
Toujours au bout de vos doigts, par le biais d'écrans tactiles, sont dévoilées d'autres facettes de la voile. Aux plus novices d'entre vous, c'est Kersauson qui explique les rudiments de la navigation. Aux plus connaisseurs, ce sont des spécialistes qui détaillent, ici l'architecture et la filière navales, là, la conception assistée par ordinateur des bateaux... Pour vous tous, l'écoconstruction et le recyclage des bateaux, thèmes bien dans l'air du vent, sont abordés aussi. Un étonnant montage vidéo ne laisse personne de marbre : il révèle la fabrication d'un bateau entier… en accéléré !
Un vrai voilier ?
De bateau, vous en retrouvez un, de 18 mètres de long, dans un format des plus inattendus : plaqué, imprimé grandeur nature sur le mur du fond de la salle. Son mât de carbone noir, lui tout à fait vrai, traverse horizontalement la salle de ses 27 mètres… la longueur de ceux utilisés pour le Vendée Globe ! Un écran tactile, juste en dessous, vous permet de détailler toutes les parties du bateau, localisées sur le mur par un laser vert… un procédé ludique comme il y en a beaucoup dans cette cité.
Naviguer oui, mais sereinement
Une autre embarcation apparaît, une que, là encore, vous avez peu l'occasion de voir dans cette configuration, et c'est plutôt rassurant à vrai dire : bien gonflé et posé sur une petite estrade, trône un canot de secours, orange vif comme il se doit ! À côté, sa boîte dans laquelle on se demande éternellement comment il peut bien rentrer. Puis, des gilets de sauvetage pour toute la famille, dont celui décoré d'amusants motifs pour les enfants. Une combinaison de manœuvre et de survie, une bouée à l'ancienne en fer à cheval, une pharmacie embarquée, un seau à l'œil pour écoper… vous venez de traverser l'instructif espace dédié à la sécurité bien sûr !
Vivre à bord…
Voici deux colonnes de plexiglas remplies : l'une par les aliments consommés par dix personnes en une journée à bord d'un bateau de plaisance ; l'autre par le même contenu, mais pour un bateau de course… Édifiante différence ! D'où l'intérêt du lyophilisé. Sont exposés ensuite des instruments liés à l'énergie à bord : un hydrogénérateur et une éolienne, notamment. Puis les outils qui aident à suivre le bon cap, du cabestan au GPS, en passant par les prévisions météo.
Souvenirs et apprentissage
Pour les plus débutants dans la navigation à la voile, et pour les enfants, les principales manœuvres sont résumées sur de grands panneaux lumineux et illustrés : prendre un ris, affaler, mouiller, s'amarrer à couple ou à quai… Et là encore vous pouvez tâter : sous vos doigts, un sac à voile frissonne, des cordages s'amollissent, une ancre résiste… Douces réminiscences, n'est-ce pas ?
Place aux héros !
Cet espace est dédié aux skippers les plus compétents et à leurs récits les plus impressionnants. Vous admirez les maquettes au 1/30e de mythiques voiliers tels le Joshua, Le Banque Pop V, le Macif. Vous regardez aussi des vidéos pour les voir en action, et vous vous placez sous des douches sonores où les témoignages pleuvent sur vous… Christophe Cudennec et son chavirage en mer d'Irlande ; Amel Le Cleac'h et son passage du Cap Horn ; Isabelle Autissier et ses souvenirs des mers du sud ; Jean Le Cam et son sauvetage par Vincent Riou ; Raphaël Dinelli et son naufrage ; François Gabart et son arrivée victorieuse au Vendée Globe ; Michel Desjoyaux et ses astuces et systèmes D lors du Vendée Globe dans le Pacifique Sud ; Yann Elies et ses hallucinations dues au manque de sommeil… Bref, vous en prenez plein les oreilles !
Eric et Pen Duick
Parmi les héros de la mer, Eric Tabarly n'a pas son pareil. Un personnage que petits et grands (re)découvrent dans l'espace qui lui est consacré. Dans la réplique de la cabine du Pen Duick II que vous traversez, vous voyez concrètement comment tout y était pensé pour la course : un tout petit coin-cuisine avec la selle sur laquelle il s'asseyait ; une table à cartes amovible montée sur un arceau pour les jours de gros temps ; la demi-bulle de plexi de son invention, dépassant de la cabine pour pouvoir, abrité, surveiller dehors… Le tout, vous le parcourez courbés : 1,40m de hauteur de plafond seulement !
Hommage au navigateur
Juste sortis, vous vous redressez, mais c'est pour vous pencher à nouveau, cette fois-ci, sur des objets évocateurs de l'existence de Tabarly : sa casquette d'enseigne de vaisseau de 1re classe, un winch pour le moins usé, des couvertures de magazines qui l'encensent… Et, le plus émouvant peut-être, son livre de bord ouvert sur son écriture manuscrite. Deux grands écrans encadrant un portrait de lui, diffusent des images de ses exploits. Nostalgie, nostalgie… qui ne faiblit pas avec les maquettes de ses bateaux, les Pen Duick et Paul Ricard, exposées juste à côté.
D'une génération aux suivantes…
C'est l'espace 3-6 ans qui s'ouvre ensuite. De quoi distraire, mais aussi instruire les tout petits ! Sauter, colorier, dessiner, caresser, tâter, wincher, mouliner, nouer, barrer, hisser, serrer, amarrer, écouter, regarder, réfléchir, anticiper… que de choses à expérimenter dans cette sorte de camp d'entraînement ! Et pour les un peu plus âgés, une course virtuelle conçue par Virtual Regatta : cinq apprentis skippers sur la ligne de départ et, en lieu et place des barres, des écrans tactiles sur lesquelles, pour manœuvrer, glissent et tapotent les doigts. Devant, en guise d'horizon, un grand écran sur lequel des bateaux se courent après !
Jovial entrainement !
De plus réalistes sensations, c'est ce que vous trouvez après dans un espace où vous manipulez bouts, amarres, voile, enrouleur, écoutes, drisses… Vous pouvez même vous glisser dans un Laser et y prendre la position, barre en main et bôme en bonne place. À quelques pas, c'est votre attention qui est davantage sollicitée : de grands écrans, et, devant chacun, une roue ou une barre, à manipuler avec dextérité sous peine de mener avant l'heure, votre fictif bateau à son terme ! Les changements de cap, vous les ressentez de façon très réaliste. Plus encore d'ailleurs lorsque vous arrivez devant celui que l'on nomme "simulateur"...
Prenez la barre !
Il s'agit là, pour vous, de sortir le Pen Duick VI du port : à la roue, qui est positionnée devant, certains skipper, très concentrés, s'agrippent, tandis que d'autres, beaucoup plus détendus, n'y posent qu'une main, l'autre en poche. Votre attention, il la faut intense aussi pour contrôler votre maquette de voilier de course, posée dans le grand bassin central équipé d'une soufflerie. Avec deux joysticks, nommés "Voiles" et "Safran", vous découvrez les difficultés de marier éléments naturels et techniques ! Pour vous défouler physiquement, rien ne vaut quelques tours de manivelles… de "moulins à café" plutôt : deux sont là, positionnés devant un énième écran affichant le nombre de tours, attendant que vous vous arcboutiez pour les actionner au plus vite !
À vous la course !
Dans le sas d'entrée de cette attraction, des sièges et un écran sur lequel défilent d'impressionnantes images de course au large… Dans la salle suivante, vous vous calez dans l'un des douze sièges de la plateforme installée face à un grand écran. Lunettes 3D sur le nez, et ceinture de sécurité bouclée, vous êtes prêts à expérimenter le cinéma dynamique 4D "Océan Ride". Sur un bateau de type IMOCA (Vendée Globe), vous embarquez pour un tour du monde, en quelques étapes pour le moins remuantes et surprenantes ! Tangage, roulis, grain, rafale, naufrage, casse, embruns, houle, iceberg, concurrent, arrivée : à chaque mot, ses sensations… validées par de vrais skippers, annonce-t-on !
Face au mythe…
Pour reprendre pied sur terre, une balade s'impose… pas n'importe laquelle : celle qui emprunte la passerelle entre la Cité de la Voile et le ponton d'attache des chers Pen Duick de Tabarly. Ils sont là, Pen Duick, Pen Duick II, Pen Duick III, Pen Duick V et Pen Duick VI. Vous admirez leurs coques noires fuselées, que l'on devine si bien fendre la mer. Avec Tara, le fameux navire océanographique dont le port d'attache est aussi Lorient, vous avez sous les yeux la fine fleur de la voile !