La silhouette de l'Euphorie 5 en impose. Force est de reconnaître que l'architecte Marc Lombard a fait du bon boulot sur le plan esthétique. Le rouf en sifflet confère un zeste d'agressivité qui se marie parfaitement avec le fly bridge plutôt bas et son T-top aérien.
Les étraves verticales et légèrement tronquées à hauteur du pont paraissent plus agressives que celles du Série 5 – ce sont pourtant les mêmes. Construction tout sandwich PVC/verre identique, y compris pour les cloisons structurelles. Et bien sûr des crash-boxes aux étraves comme aux poupes. Les deux moteurs de 320 chevaux Yanmar sont des blocs V8 common ride de 4,4 litres de cylindrée. La motorisation de base est 2 x 220 ch.
Une barre très douce, comme le volant d'une voiture moderne
L'écartement des coques offre une grande facilité de manœuvres quand on inverse les gaz ; le propulseur d'étrave n'est pas indispensable. Aux commandes, perché sur le fly bridge, la vue est excellente sur le plan d'eau. La plate-forme masque toutefois les poupes – il suffit de reprendre les commandes à un second poste de pilotage installé à l'arrière bâbord. On est surpris par le faible bruit des moteurs et l'absence de vibrations.
La barre offre une sensation inédite : elle est très douce et surtout revient en ligne droite quand on la lâche, comme une direction assistée de voiture. Avec sa commande électro hydraulique, la barre gère indépendamment les deux safrans - pas de liaison entre les deux. On peut intervenir sur les réglages de ce système de direction, lequel se met en route dès l'allumage des moteurs. Possibilité également de synchroniser les deux moteurs - la manette gauche peut tout commander.
De la vitesse sous les manettes
L'accélération est franche puisque la vitesse maximum, 20 nœuds, est atteinte en moins de 11 secondes. Un virage à fond se traduit par une courbe de 70 à 80 m de rayon ; l'Euphorie 5 reste rigoureusement à plat. Une sensation étrange pour un habitué des Sport Cruiser qui s'inclinent à l'intérieur du virage. C'est face au clapot que le comportement est le plus convaincant : pas de tangage, des mouvements doux et pas d'embruns. Marc Lombard a particulièrement travaillé le tiers arrière des coques afin de disposer de plus de volume et d'une courbe inversée qui fait office de flap. Le but est d'optimiser le travail des hélices et de limiter le cabrage à 2°.
L'Euphorie a été conçu pour des vitesses de 10 à 15 nœuds mais son comportement reste excellent à plus petite et haute vitesse. En revanche, les réservoirs de carburant sont pour l'heure trop justes. Avec 2 x 545 litres, on dispose de 345 milles d'autonomie à 10 nœuds. Le chantier travaille d'ailleurs à cette optimisation – puissance des moteurs et capacité carburant.
Objectif farniente sur le pont
Le plan de pont est décliné en trois versions. La première conserve peu ou prou la silhouette du Série 5, la deuxième intègre un fly bridge et enfin celle dont nous disposons pour cet essai d'un fly bridge protégé par un T-top. Le cockpit est bien abrité sous le bimini, avec une grande table de 120 par 93 cm, de nombreuses assises, deux méridiennes, une grande banquette arrière et un passage bien dégagé tout contre les bossoirs. Quelques volées de marches mènent à de larges plates-formes de baignade.
Les passavants sont larges (57 cm minimum) et protégés par un haut bastingage. Les mains courantes sont toujours là. A l'avant, une vaste surface en dur – le fameux rostre -, deux petits trampolines et trois bancs de balcons. Un escalier hélicoïdal de sept marches mène au fly. Là-haut, le poste de pilotage, bien sûr, mais également de vastes banquettes en U à l'arrière, des coffres de rangement et un réfrigérateur.
Sur la face avant, un passage amovible est prévu pour l'accès à des bains de soleil. Des marches – trop petites – en quinconce sont moulées pour un accès direct au pont avant. Les taquets d'amarrage sont passés de 45 à 50 cm et sont plus hauts pour s'accommoder des plus grosses aussières.
Emménagements confortables et personnalisables
L'accès à la nacelle est à niveau et sans seuil depuis le cockpit. L'ouverture, grâce à ses trois modules vitrés dont deux coulissants, offre 189 cm de hauteur par 144 de largeur. La trame des emménagements est quasi la même que celle du Série 5. La nacelle propose un volume imposant avec une cuisine en U à l'avant bâbord. Le carré est positionné à tribord ; il propose une table de 130 cm par 76. Le plateau est mobile et se baisse à la demande. La table à cartes jouxte le cockpit, à bâbord. On s'y installe travers à la marche, face à un plateau de 72 par 65 cm.
Cette disposition préserve une grande surface de plancher et donc une circulation toujours aisée. La qualité de finition est remarquable, jusque dans les moindres détails – assemblages, circuit électrique. Les batteries, idéalement centrées sous le plancher, sont protégées par une plaque. 5 marches et 130 cm plus bas, les cabines. A noter : la hauteur sous barrots est partout supérieure à deux mètres.
Des cabines mieux qu'à la maison
Trois versions sont proposées : en standard, on a droit à trois cabines dont une master immense, casée dans le rostre central. La deuxième déclinaison rogne un peu cette fameuse cabine sur bâbord pour en aménager une double plus modeste. Enfin le troisième plan offre quatre cabines doubles. C'est cette version que nous découvrons… à ceci près que la cloison de séparation des deux cabines avant a été déplacée sur bâbord afin de favoriser… une suite propriétaire déjà spectaculaire à tribord. C'est ici que le chantier montre la prise en compte des souhaits de ses clients.
Tant qu'on ne touche pas à la structure du bateau, toutes les personnalisations – disposition générale, boiseries, sellerie, éclairage -sont possibles. Les Privilège défendent donc une vision one off du catamaran, bien loin du diktat de la standardisation longtemps imposée par les grands constructeurs – lesquels semblent en revenir. Chaque cabine propose un lit double de 2 m par 1,55 (ou deux simples) et profite d'un cabinet de toilette privatif.
Un bon démarrage commercial
L'Euphorie 5 semble bénéficier d'un excellent accueil sur le plan commercial – il a été présenté pour la première fois au public au Cannes Yachting Festival 2018. Un succès mérité : dans cette catégorie des catamarans à moteur haut de gamme, ce nouveau modèle est une incontestable réussite. Marin, confortable et élégant, il invite à la croisière. Et pourrait même nous emmener beaucoup plus loin avec des réservoirs plus importants.