L'installation du parc solaire, sur le toit du roof, avait rendu obsolète le joli escalier en colimaçon qui y donnait accès.
Cependant, pour aussi charmant qu'il fût, cet édifice n'ayant plus aucune utilité n'en mobilisait pas moins un volume considérable au sein même de notre espace de vie privilégié : le cockpit.
Aussi avais-je conçu de par moi-même, tranquilouà l'intérieur de ma tête, le projet de le dégommer à la tronçonneuse, afin d'y installer, pourquoi pas, un bar, à dessein d'y recevoir dignement certains de mes amis sensibles à ce genre d'attention.
Un jour que je trouvais le moment opportun pour attaquer cette tâche essentielle, je me décidais à en dévoiler quelques détails à Malou, pensant vraiment qu'un moment où l'autre il eût fallu qu'elle le sût, et qu'il n'était peut-être pas judicieux d'attendre qu'elle ait le résultat sous les yeux pour prendre son avis…
Ouhhlàlà, ouhlàlà…
J'eus à faire face à un véto sévère. Un "non !" tout ce qu'il y avait de plus négatif.
Je me heurtais à un mur de granit, de celui-là même dont sont faits les escaliers hélicoïdaux qui mènent aux chaires des églises bretonnes.
Légèrement K.O. debout par la véhémence de son attitude face à un projet à l'intérêt pourtant si évident, je boudais quelques secondes. Le temps de reprendre mes esprits, puis m'en fus "switcher" la zone productive de mon cerveau en mode "magne-toi d'inventer un truc intelligent avant que ça ne tourne en sujet de discorde".
Par bonheur, le ciel me vint en aide (sous l'impulsion de Bacchus, peut-être ?) et je fus en mesure, quelques jours plus tard, de revenir vers ma belle avec la proposition suivante, dont j'avais pris garde de bien soigner la présentation :
Il s'agissait de laisser intactes les deux marches du haut, ainsi que le devant de la toute première, en bas.Les trois autres feraient l'objet, non pas d'une coupable destruction tout à fait inacceptable (comment ne m'en étais-je pas rendu compte dès le début ?), mais, au contraire, d'une simple "dépose" au cours de laquelle elles auraient à subir l'ablation de quelques décimètres-carrés, avant de se voir assemblées entre elles dans une posture des plus artistique qui leur confèrerait une aptitude particulière à devenir ce qu'elles n'auraient jamais osé espérer, même dans leurs rêves les plus délirants : une façade de bar pour Lady't Bee.
Ingénieux, non ? Et l'idée plut.
Et quelques semaines plus tard, le réfrigérateur recevait ses premières bières. La machine à glaçons crachait ses premiers cubes gelés et le "Bar de l'Escalier" recevait ses premiers hôtes, prouvant instantanément, s'il en était besoin, que ce bar là n'abhorre pas le congre luigre (en référence à un sketch de Pierre Desproges dont l'auteur est un fervent admirateur).
À présent que cet élément majeur de la Lady est achevé et bien intégré, je remercie Malou de m'avoir évité de commettre je ne sais quelle hideuse installation en lieu et place de ce beau bar…
Dans l'épisode suivant, l'auteur nous explique son installation pour protéger le cockpit de la pluie et pour bien aérer le bateau.