Comment avez-vous eu l'idée de réaliser ce film ?
Je fais un peu de surf, mais je n'ai le niveau de Gaspard (NDLR : Larsonneur) et Ian (NDRL : Fontaine), les deux surfeurs pros du film. À la base, je fais énormément de ski et j'ai donc une grosse culture de film de ski. Mais je trouve ça difficile de faire un film sur ce sport, car j'ai déjà vu tellement de choses, que je risquerais de reprendre certaines idées déjà exploitées. J'ai décidé de partir plutôt sur le surf.
Pour moi le surf, c'est quelque chose de nouveau. Je trouvais ça intéressant de réaliser un film avec ce regard complètement vierge. Je connais tous les axes de caméra que l'on peut utiliser dans le ski et c'est palpitant de faire un film de surf sans savoir forcément le faire, sans avoir forcément la technique. C'est un côté nouveau, qui me plait pas mal.
Il y a un film de ski – Afteglow – réalisé par Sweetgrass Productions qui utilise cette technique de projection de lumière et que je trouvais splendide. Des projecteurs de 4 000 watts éclairent la montagne avec des gélatines de couleurs et le rendu est superbe. Je voulais faire la même chose sur l'eau sauf que la lumière se réfléchit beaucoup plus facilement sur la neige parce qu'elle est blanche. Faire la même chose avec les mêmes projecteurs au bord de l'eau ce n'était pas possible. Il fallait une source lumineuse énorme.
L'idée ce n'était pas de faire une vidéo de surf de plus, mais de prendre l'univers du surf et d'y inculquer un esthétisme pour essayer de créer un environnement mystique.
En quoi ce film était un défi technique ?
J'ai eu l'idée il y a un peu plus d'un an. C'était un vrai défi technique avant tout et surtout un gros défi financier, pour lequel on n'avait pas les moyens. Ce film requiert du matériel de très haute performance – amener 100 000 watts au bord de l'eau – avec un groupe électrogène (un camion de 30 tonnes) et des projecteurs qui font chacun 12 000 watts. Par l'intermédiaire d'amis travaillant dans le milieu du cinéma, on a pu avoir de bons contacts avec des loueurs. On s'est donc lancé avec la WAG Productions.
Quelle était l'organisation ?
On a travaillé en équipe réduite d'une dizaine de techniciens, sur 4 jours de tournage. Avant ça, il y a eu 3 mois de préparation. Tout l'enjeu du film, c'était d'éclairer, or les 4 projecteurs font plus de 200 kilos chacun. Pas facile à déplacer !
Il fallait aussi se coordonner avec les conditions météo qu'il y ait des vagues… On a tourné du 2 au 5 novembre, mais avec seulement une nuit de session de surf, de 1 h 30 à 5 h 30. Les 3 autres jours étaient consacrés au lifestyle. Le premier soir on s'est préparé et les autres jours on a shooté l'intro sur la côte sauvage (Quiberon) et sur des plages diverses que l'on avait repérées.
Quand on a sélectionné le spot de La Torche, on ne connaissait personne sur place. Et c'est par le biais d'amis d'amis que j'ai rencontré les deux surfeurs du film. Ce sont des gars géniaux et détente, mais très professionnels. Ça c'est hyper bien passé !
On a tourné ce film de manière très pro avec des techniciens, etc., mais c'est avant tout un film de potes, avec une bonne ambiance. Les producteurs de Wag sont des potes, on a tous entre 25 et 30 ans…
Ce tournage, c'est 4 jours où on ne dort pas vraiment ! Mais on a pris beaucoup de plaisir à le faire ! Les mecs (NDRL : les surfeurs) sont rentrés dans l'eau dans un spot mythique avec des couleurs sur l'eau qui se reflétaient sur l'écume et qui donnaient l'impression de perles colorées.
Pourquoi avoir choisi le spot de La Torche ?
La configuration est parfaite pour le film : une avancée rocheuse pour installer un premier axe de lumière, la plage pour installer le deuxième projecteur et une vague droite pour refléter la lumière et filmer les surfeurs face caméra. Au total, il y avait 3 caméras, une sur la pointe rocheuse, une proche de la plage et une autre aérienne (drone).
La Torche, c'est aussi un spot mythique en Bretagne, dont le nom me plaisait beaucoup. Dans ce film, je voulais inclure une dimension narrative et cinématographique. En faisant, bruler une planche de surf, je faisais référence au nom, mais je donnais aussi une dimension religieuse et mystique au film. En effet, en Australie il est de coutume de bruler une planche pour faire une offrande à Huey, figure mythologique qui créée les vagues.
Tout s'est déroulé comme prévu ?
Sur le tournage on s'est fait peur, plusieurs fois. Dans la préparation, on avait fait des calculs sur la pénétration dans l'eau, les surfeurs, la distance, les gélatines (disques de couleurs que l'on positionne devant les projecteurs), la sensibilité de la caméra… Pour moi sur le papier, tout roulait, mais on n'avait pas les moyens de faire un test réel. C'est à l'allumage des projecteurs que c'était quitte ou double ! Mais on a eu de la chance !
Quel est l'objectif avec ce film ?
C'est un pur film vitrine ! On l'a fait et envoyé à la presse pour montrer ce qu'on savait faire dans des conditions extrêmes. Ça nous a couté 10 000 €, on a coupé le budget en deux (5 000 € chacun entre Hugo Manhes et Wag Production) et vu le matériel utilisé, ça aurait pu nous couter beaucoup plus !
À terme, j'aimerai shooter pour des marques dans le milieu de la glisse. J'aimerai beaucoup tourner quelque chose sur la vague de Belharra (Pays Basque) et de Nazaré (Portugal) et c'est d'ailleurs quelque chose qui est en cours.
Quel est ton parcours ?
J'ai commencé dans le cinéma en tant qu'assistant caméra dans la série No Limit (produite par Luc Besson) et après j'ai géré la post-production du réalisateur Quentin Dupieux et je me suis lancé en tant que réalisateur. J'ai d'abord commencé à bosser pour la Wag (production) avant de me lancer de mon côté. Ensemble, on tourne des pubs et des projets perso (films à des courts-métrages de fiction). La Torche, c'est mon premier projet perso.