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Une course décisive qui lancera la mode Tabarly
Lorsqu'Eric Tabarly arrive à Newport après 27 jours, 3 heures et 56 minutes et décroche la 1re place du podium, personne ne s'y attend. Parti de Plymouth en Angleterre il ne se doute aucunement de sa position à son arrivée sur les côtes américaines. C'est seulement à quelques dizaines de milles de la ligne d'arrivée qu'un marin du bateau-feu lui crie "You're the first !".
Peu médiatisée par rapport à aujourd'hui, la Transat anglaise en solitaire va faire de Tabarly un héros moderne. Il devance largement les 14 autres concurrents, dont le favori anglais Francis Chichester, vainqueur de la 1re édition qui avait eu lieu 4 ans auparavant.
Tabarly et sa victoire sont alors diffusés sur les unes des journaux français, mais aussi sur les radios et télévisions nationales. Le Général de Gaulle le fait chevalier de la Légion d'honneur à son passage de la ligne d'arrivée. Quelques mois plus tard, il recevra les félicitations du chef de l'état en personne lors du Salon nautique de Paris. Toute la nation se passionne alors pour ce jeune skipper tout en modestie.
Le "sage des mers" s'est imposé en référence dans le monde de la voile
Eric Tabarly est militaire dans l'aéronavale pour pouvoir se payer la rénovation de son bateau de cœur, le Pen Duick. Lors de son temps libre, il régate, avec les navigateurs anglais et quelques précurseurs français, sur la Manche. En France, la course au large est encore peu répandue, mais le jeune navigateur est persuadé de pouvoir remporter la victoire sur les Anglo-saxons.
Pour ce faire, il a même dessiné un bateau avant-gardiste : le Pen Duick II. Sa coque contreplaqué et polyester le rend deux fois plus léger que les bateaux des concurrents aux coques en bois qui sont persuadés qu'il faut naviguer lourd. Gilles Costantini expliquait dans Paris Match "Aujourd'hui, on reconnaît qu'un bateau léger offre moins d'inertie au choc, remonte mieux au vent et à la mer, et "fatigue" moins qu'un bateau lourd".
Dès le départ de la Transat, lors du coup de canon qui annonce la victoire, Eric Tabarly lance son SPI de 82 m2 dès les premières encablures et laisse les spectateurs bouche bée. Pourtant, cette première course en solitaire sera éprouvante puisqu'en milieu de parcours son pilote automatique tombe en panne.
Il arrive cependant à dépasser ses limites et remporte sa première course à sa manière. Il se place alors en référent du monde de la voile et forme de nombreux marins qui ont marqué la course au large depuis : Olivier de Kersauson, Michel Desjoyeaux, Titouan Lamazou ou encore Philippe Poupon.