Diva : portrait d'un yawl signé Sparkman & Stephens, de retour sur les circuits de régates

© Laurence Mao

Diva, yawl bermudien de 12 mètres ancré à Saint-Malo, incarne à la fois l'héritage de la voile classique et l'audace de nouveaux défis avec un armement pensé tantôt course, tantôt croisière.

Dans l'univers nautique, certains voiliers conservent un charme intemporel. Diva, élégant yacht bermudien de 12,30 mètres hors-tout, incarne parfaitement cet esprit. Construit en Allemagne par le chantier naval Abeking & Rasmussen, ce bateau en acajou verni, a retrouvé sa prestance d'antan sous la houlette d'Éric Furet, son propriétaire, qui le rénove dans une optique de course-croisière.

© Cunningham
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Diva : un classique intemporel

Le voilier Diva, un classique bordé en bois, trouve ses origines dans un plan conçu en 1956 par le cabinet d'architecture navale américain Sparkman & Stephens. Sa construction a eu lieu en Allemagne, sous la supervision d'un sous-traitant d'Abeking & Rasmussen. Inspiré du Dorade, un autre bateau dessiné par Olin Stephens, vainqueur du Fastnet en 1931 et 1933 ayant faît connaitre le fameux architecte, Diva marque le début d'une série de voiliers signés Stephens qui restent inégalés dans les régates de l'époque.

Diva arbore une parure en acajou verni et est gréé en yawl bermudien. Son plan s'inscrit dans la lignée des "Finisterre", dont les premiers modèles remontent à 1956. Parmi les 17 unités produites, 9 étaient équipées d'un puits de dérive, tandis que la quille longue, comme celle du Diva, a été adoptée ultérieurement. Sur les quelques 60 modèles initialement construits, seuls 4 ou 5 subsistent encore dans le monde. L'évolution des architectures navales étant une préoccupation majeure, Sparkman & Stephens fournissait les plans, tandis que les propriétaires individuels personnalisaient les aménagements en sélectionnant des matériaux de qualité.

Il semble que Diva n'ait jamais participé à une course depuis sa mise à l'eau en 1963.

En 2019, il est racheté par Eric Furet, qui devient ainsi son troisième propriétaire. Originaire de Blois, Eric entre tôt dans le monde de la voile. Au cours de son service militaire long, il est affecté à la Marine Nationale, en 1992, en tant que matelot sur Belle Poule. Il navigue ensuite sur de vieux gréements : Don du Vent, Étoile... Sa quête d'un voilier adapté à ses besoins, à la fois pour faire de la croisière et pour s'engager dans des compétitions sportives, le mène à trouver Diva aux Pays-Bas.

Eric Furet à la barre du Diva © Laurence Mao
Eric Furet à la barre du Diva © Laurence Mao

Découvert dans les anciens ateliers de Huisman, en périphérie d'Amsterdam, Diva est dans un état de conservation remarquable, ayant été soigneusement entretenu par ses deux précédents propriétaires allemand et néerlandais. Hiverné dans un hangar chauffé, sa robe est revernie chaque année pendant les frimas.

Refit et réarment annuel

Après son arrivée à Saint-Malo en 2020, Eric Furet continue de veiller sur Diva en lui accordant annuellement un entretien au chantier du Tanet à Mihinic-sur-Rance, spécialisé dans les constructions en bois depuis les années 80. Cette maintenance est essentielle pour ce voilier en bois de plus de 60 ans, désormais classé comme Bateau d'Intérêt Patrimonial (BIP). Au fil des saisons, Diva est remis au goût du jour, avec un refit de son accastillage et de ses voiles afin de lui permettre d'être évolutif lors des régates. Des travaux de charpenterie de marine sont également réalisés. "Les colorations foncées que l'on peut observer sur la coque sont dues à des réparations engagées après que le bateau ait été percuté. C'est de l'acajou collé ; il n'y a ni joints, ni calfatage. La finition est parfaite", souligne François Seguin, ami d'Eric et boat captain du Diva.

En 2024, de nouveaux aménagements ont été entrepris sur le bateau comprenant l'installation d'un spi plus grand, d'une trinquette de tape-cul et d'une trinquette de spi afin de tirer le meilleur parti de ses capacités, en référence à ses illustres prédécesseurs tels que Dorade ou Stormy Weather, du même cabinet Sparkman & Stephens. D'autres éléments ont été revus, car chaque détail compte : des martyrs ont ainsi été placés, les bosses de ris entamant le bois de la bôme. ''Tous les ans, il s'agit d'en faire un peu'', explique Eric.

Sur le chantier, les professionnels s'activent sous son regard avisé. Ensemble, ils travaillent sur les gabarits pour intégrer les embases des chandeliers au niveau du balcon arrière. ''Seuls 3 joailliers en France sont formés pour réaliser le travail de coulage du bronze'' nous dit Eric, ''ils ont été formés par la Marine Nationale française''.

Un bateau qui fait ses preuves

''Avec des équipages au riche palmarès (America's Cup, Solitaire du Figaro, Tour du Monde, transats, olympisme, Mini Transat, Championnat du RORC, équipe de France...), Diva s'est distingué dans toutes les compétitions où il a été présent'', raconte François, qui s'occupe également des relations publiques du voilier. Ses sisterships ont d'ailleurs souvent occupé les premières places des podiums de la Bermuda Race dans les années 60. Il avait donc un potentiel certain.

© Pierrick Contin
© Pierrick Contin

Désireux de se confronter à une flotte plus dense dans sa catégorie, Diva s'est rendu en Bretagne sud début juin 2023 pour prendre part aux Voiles de la Citadelle à Port Louis. L'événement réunissait 32 concurrents, dont 4 des Pen Duick d'Eric Tabarly. Il s'y est illustré en décrochant une belle victoire. Par la suite, Diva a remporté la première place à la Régate des Zèbres en Rance en mai 2023. Enfin, le Branle Bas de Régates à Saint-Malo, événement phare de la cité corsaire célébrant en 2023 son 85e anniversaire, à la mi-août, clôturait le programme des grandes courses du Diva. Après quatre jours de compétition acharnée entre Saint-Malo, les Hébihens, les îles Chausey, Granville et Cancale, Diva a une fois de plus inscrit son nom au tableau d'honneur, s'imposant de justesse devant le second, Ossian, de Patrice Ratzel.

© Cunningham
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Des ambitions de navigation réaffirmées

Diva prendra à nouveau le large le 9 avril prochain à Saint-Malo pour des essais. Huit équipiers sont prévus pour les manœuvres de bord, toutes les drisses se trouvant aux pieds de mâts.

© Pierrick Contin
© Pierrick Contin
© Pierrick Contin
© Pierrick Contin

''Bien qu'il ne soit pas si lourd (10 tonnes), l'allègement du Diva est un élément primordial à prendre en considération. C'est toutefois un bateau qui demande un minimum de poids pour être performant'', fait remarquer François. De son côté Eric plaisante : ''Pour la course, on enlèvera les verres en cristal ! Si ça peut nous faire gagner quelques nœuds... tout est bon à prendre !''.

© Pierrick Contin
© Pierrick Contin

Le reste du programme pour 2024 est déjà bien établi. Le bateau sera réarmé pour les entraînements des week-ends en baie de Saint-Malo, ainsi que pour la Régate des Zèbres en Rance, en juin. Pour la suite, une série de manifestations est déjà planifiée : la Belle Plaisance à Bénodet en juin, le Rassemblement de Brest en juillet, et le Branle Bas de Régates à Saint-Malo en août. Puis, pour les années à venir, Diva envisage une saison dans les eaux anglaises avant de redescendre régater à La Rochelle et en Méditerranée.
Eric ne compte pas s'arrêter là, dans quelques années, il vise la participation à la Transat Classique.

© Pierrick Contin
© Pierrick Contin

À Saint-Malo, si vous entendez parler du ''Diva of Cunningham'', rien à voir avec le dispositif de réglage de guindant. C'est parce qu'Eric Furet est aussi le patron d'un hôtel-bar qui porte le nom ''Cunningham''. Et devinez quoi ? L'intérieur est une réplique du Diva !

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