Visibilité en mer : vitesse, obscurité et alcool, quels effets sur le barreur ?

Bien voir l'horizon pour naviguer en sécurité est essentiel, mais les facteurs environnementaux peuvent influer sur les capacités visuelles du barreur. Quelle est la réduction du champ de vision en fonction de la vitesse ? Comme la nuit réduit-elle la vue du pilote ? Comment l'alcool altère-t-il la vue ? On vous l'explique pour mesure les risques pris en toute connaissance.

Les accidents graves survenus dans les eaux françaises font l'objet d'un rapport du Beamer, un organisme national en charge des enquêtes. Celui sur la collision entre les navires Yakuza's Boat et Rum'N Fishing survenue le 4 août 2022 est riche d'enseignement concernant les nombreux phénomènes pouvant altérer la vision d'un barreur et leurs conséquences dramatiques.

Un pilote de bateau rapide perd la vision périphérique

Si cela peut sembler évident, il est toujours utile de rappeler combien la vitesse limite la vision d'un barreur. En effet, lancé à pleine vitesse, on ne voit pas sur les côtés. Le Beamer rappelle dans son rapport quelques chiffres que chacun doit avoir en tête sur le champ de vision horizontal du pilote du bateau.

  • A l'arrêt, l'œil du barreur voit à 75 ° de chaque côté.
  • A 21 nœuds, il voit à 50° de chaque côté
  • A 37 nœuds, il voit à 37,5° de chaque côté
  • A 53 nœuds, il voit à 22,5° de chaque côté
  • A 70 nœuds, il voit à 15° de chaque côté

Ainsi, plus le bateau va vite, plus il est essentiel de balayer régulièrement le plan d'eau en tournant la tête.

S'habituer à l'obscurité avant de naviguer

Lorsque l'on navigue de nuit, notre œil doit s'adapter à la faible luminosité. N'étant pas naturellement nyctalope, comme le chat, il faut du temps pour voir dans la pénombre. La lumière blanche est à proscrire, et les éclairages de couleur sur les tables à carte prennent ce facteur en compte depuis longtemps.

Les experts du Beamer indiquent ainsi que le passage à la vision nocturne nécessite de 20 à 30 minutes pour être optimal. La vision centrale est moins performante. Particulièrement problématique en navigation, la perception des couleurs et l'estimation des distances est moins bonne, pouvant rendre difficile la détection de feux de navigation s'ils sont noyés dans le halo lumineux de la côte.

Il est donc recommandé de rester particulièrement vigilant, surtout lors de navigations de nuit de courte durée, où l'œil n'a pas le temps de s'acclimater, et a minima lors de la 1ère demi-heure.

L'alcool, un ennemi à la barre

Si l'altération des sens par l'alcool n'est plus à prouver et désormais bien intégré comme chauffeur automobile, il l'est parfois moins comme skipper. Pourtant, les conséquences peuvent être tout aussi dramatiques. L'alcool ralentit la prise de décision et augmente la prise de risque. Il rend plus sensible à l'éblouissement, réduit la vision périphérique et limite la détection des couleurs, en particulier le rouge, couleur essentielle pour la navigation. Un marin raisonnable devra donc en tenir compte pour éviter de faire courir des risques à son équipage et aux autres bateaux.

Pour une veille efficace en navigation, assurons-nous de mettre toutes les chances de notre côté.

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