Portrait / Achille Nebout, skipper de course au large passionnément compétiteur

Achile Nebout © DR

Achille Nebout n'est pas né sur un ponton, pas plus qu'il n'a usé ses fonds de cirés dans le bateau familial. C'est quasi accidentellement qu'il a embrassé le nautisme et que c'est devenu sa passion. Portrait du jeune marin de course au large.

À 31 ans, Achille Nebout a la justesse de ceux qui veulent en permanence apprendre et découvrir la pratique qu'ils chérissent. C'est après avoir été diagnostiqué d'un trouble de la croissance qu'il a délaissé les crampons du football pour chausser les chaussures de pont.

Achille Nebout, navigateur course au large (Photo : Robin Christol)
Achille Nebout, navigateur course au large (Photo : Robin Christol)

Kito de Pavant en meilleur ami paternel

Sa carrière, Achille nous en parle ainsi : "C'est à Montpellier avec des stages d'été en Optimist, vers l'âge de 10 ans, que j'ai commencé. Avant, je faisais du foot, mais ma santé en a décidé autrement. Si ma famille n'a jamais été faite de grands pratiquants, mon père a pour meilleur ami Kito de Pavant. A défaut de pratiquer donc, je trainais sur les pontons, sentant qu'il y avait là quelque chose d'attirant".

La suite est somme toute classique "À peine ai-je commencé à tirer des bords que j'ai senti la passion en moi. J'ai rapidement voulu démarrer la compétition, non pas pour obtenir de gloire, mais pour parvenir à estimer mon niveau par rapport à d'autres".

Avec succès d'ailleurs, Achille enchaîne les consécrations :

  • 2019 : 14e de la Solo Maître Coq (FIGARO)
  • 2018 : Champion du monde SB20 
  • 2017 : 4e sur le Tour Voile 
  • 2014 : Champion de France Match Racing
  • 2011 : Vice-champion d'Europe Jeune en 470
    • 4e championnat du monde jeune
  • 2008 : Champion de France en 420

De la difficile cohabitation des études et de la pratique

En 2008, Achille entre à l'INSA de Lyon, où il suit des études d'ingénieur. Il fait de nombreux allers/retours entre Lyon et Marseille, où il a intégré le Pôle jeune de la FFVoile. Brillant sur les podiums comme dans sa formation académique, Achille devra faire un choix dans ses objectifs de carrière. Ce sera le cas lorsqu' Achille obtiendra son diplôme.

Sa vie professionnelle sera maritime ou elle ne sera pas : "Les choses que j'ai apprises dans ma formation d'ingénieur représentent des atouts pour la gestion d'un bateau, contraint par excellence aux forces de la physique. Mener un bateau de course nécessite une véritable maîtrise du vent. Je retrouve l'aspect mathématique et cartésien que j'ai appris. Et j'y ajoute énormément de sensations. J'aime être sur l'océan et contempler en vrai les images qu'on voit à la télé, ça fait partie du plaisir."

D'ailleurs, selon le skipper, quel est son point fort principal en bateau ?

"Je pense être assez entier sur pas mal de domaines" commence-t-il. "Le fait d'avoir approché différents supports m'a donné un ressenti différent. La rigueur de l'ingénieur a aussi apporté un regard plus froid et plus concret. Et je suis têtu. J'ai bâti ce projet de A à Z en partant de pas grand chose, je suis assez obstiné."

Apprendre, encore et encore 

C'est par l'observation, le contrôle et la remise en question qu'Achille apprend (Photo : DR)
C'est par l'observation, le contrôle et la remise en question qu'Achille apprend (Photo : DR)

Une chose est manifeste dans le parcours passé - et sans doute à venir - d'Achille, il veut apprendre et confronter ce qu'il sait en théorie à la réalité du terrain. C'est assurément la raison qui l'amène à multiplier les supports. "En 2014, je quitte le 470 après 6 années de pratique" explique le skipper. "Je voulais tester autre chose, apprendre de nouvelles techniques et aller au-delà de mes limites d'alors."

Passage par le Figaro 3 avec "Un mini budget au démarrage. Et la fierté de rester dans le top 10 de toutes les compétitions que j'ai courues" ajoute le navigateur.

En 2018, Achille devient champion du monde à Hobart en SB 20, une classe de quillard monocoque de 6,50 mètres. Puis en 2019, il monte sur le podium du Tour de France à la voile.

Transat Jacques Vabre avec Kito de Pavant

Cette même année 2019, Achille prend le départ de la Transat Jacques Vabre à bord d'un Class 40 skippé par Kito de Pavant. Course mal engagée, à propos de laquelle il nous explique "Malgré un démâtage peu de temps avant le départ, nous sommes arrivés en septième place". Une occasion inattendue pour le Montpelliérain d'assimiler une chose nouvelle, la gestion des incidents.

Toujours des projets en tête

Le Montpelliérain profite de son énergie pour mener de nombreux projets. Il adore la musique et fait en sorte de lier ses projets nautiques aux portées musicales. Il raconte sa démarche : "J'écoute énormément de musique. Je me mets en relation avec moi-même en musique. Cela me permet de penser à autre chose qu'à la course. J'écoute tous les styles, je suis particulièrement électro en ce moment."

Achille continue : "Depuis deux ans, j'ai lié mon projet figaro à la culture. J'essaie d'associer la musique à mes projets. J'ai contacté French 79 [un musicien, NDLR.] qui est un fan immense de voile en 2020 pour une collaboration. Nous avons réalisé un documentaire (solitaireS) qui présente nos deux passions communes."

Achille et le musicien French 79 (Photo : DR)
Achille et le musicien French 79 (Photo : DR)

Musique, vidéo, voile… Achille ne cesse de tester de nouvelles choses. Quels sont ses projets d'envergure ?

Quatrième saison Figaro en Vue

Achille va reprendre le Figaro. "Classe exigeante et épuisante, le Figaro est un excellent laboratoire de formation et de confrontation à ses propres limites. Je veux repartir pour une quatrième saison. Je veux concrétiser la navigation en solo" commente-t-il. "J'adorerais viser la Route du Rhum, mais je ne possède pas encore le niveau, les places sont extrêmement chères. J'ai besoin de me faire les dents en solo et d'assurer mes compétences au préalable."

Toujours cette recherche de validation des savoirs propres à l'ingénieur qui est en lui. "Pour le moment, je vais extrêmement bien et j'étudie énormément de choses en Class40" précise le skipper. "Je ne me vois pas aller vers de l'IMOCA pour le moment, c'est trop tout pour moi. Trop grand, trop cher, trop rapide et, surtout, trop exigeant."

Et dans un futur plus lointain ?

"J'aimerais aller vers de l'architecture par la suite. Un de mes rêves, lorsque j'aurais appris suffisamment de choses, serait de dessiner un Class 40 voir un Imoca. Le mien dans l'idéal. Je voudrais réussir à naviguer et dessiner des bateaux en même temps."

Se poser et vivre

Et lorsqu'il n'est pas sur un ponton, comment va la vie d'Achille ?

"Je suis arrivé à Lorient il y a 18 mois de cela" commence-t-il. "Le bateau est à 5 minutes de chez moi, que demander de mieux ! Je suis bien dans ma vie, équilibré et stabilisé. J'ai envie maintenant de me poser et de bâtir mes carrières et de penser aux deux moments de ma vie professionnelle, la course et sa suite."

Si, pour le moment, le nom d'Achille Nebout n'est pas le plus connu du milieu, il ne fait aucun doute que le recul, le sang froid et la capacité d'apprentissage du jeune skipper lui feront gravir les marches du succès lorsqu'il sera convaincu qu'il en détient les compétences. En attendant, l'ingénieur navigateur qu'il est s'accorde le temps de se convaincre de ses compétences, sans se brûler les ailes. C'est sans doute ainsi que se forment les talents !

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