Une enfance au gré des flots
La mer c'est toute sa vie, puisque c'est à bord d'un bateau que le jeune skipper suisse a grandi. D'abord au Port Noir de Genève, sur un bateau à moteur, puis pendant onze ans autour du monde sur un voilier de 13 m en famille.
A 13 ans, il achète son premier bateau, un Mini 6.50 qu'il rénove entièrement, avant de participer à la Mini Transat 2013, de laquelle il termine 11e. Un an plus tard, tout juste âgé de 21 ans, il prend le départ de la Route du Rhum 2014 en Class40, puis en 2015, se classe à la 10e position de la Transat Jacques Vabre.
En 2016, il prend le départ de son premier Vendée Globe. Il a tout juste 23 ans, et il devient le plus jeune navigateur à avoir terminé la course. En 2020, il revient avec un tout nouveau projet pour sa 2e participation.
Une deuxième édition plus ambitieuse
"À l'issue de ce premier Vendée Globe, j'ai eu rendez-vous avec mon sponsor, La fabrique pour discuter de la suite. On a présenté un projet et c'est reparti très rapidement. On a signé pour un projet de 4 ans, qui prendra fin à l'issue de cette édition. Toute cette histoire, c'est finalement une histoire d'hommes et de femmes qui se font confiance. Des fois, il faut juste rencontrer les bonnes personnes."
C'est donc plutôt serein que le navigateur suisse s'apprête à prendre ce nouveau départ de Vendée Globe.
"Le Vendée Globe, c'est un peu une drogue. Quand tu y as gouté une fois, tu as envie d'y retourner de nombreuses fois. J'ai une véritable attirance pour le Grand Sud. Cette année, j'y vais pour réaliser une jolie performance. Le bateau a évolué (NDLR : il a racheté l'ancien bateau de Bertrand de Broc, le plan Finot avec lequel Armel Le Cléac'h était monté sur le podium en 2008-2009), l'équipe a grossi… En 2016, j'avais mis 105 jours, mon objectif cette année, c'est un tour du monde en 80 jours ! C'est engageant et c'est une super motivation."
Malgré le contexte particulier dans lequel se déroulera la course – avec un village réglementé et un taux de fréquentation qui sera forcément en baisse, Alan se sent bien.
"Je suis plutôt serein pour le moment. On sera dans notre bulle, le bateau est prêt, moi aussi."
On ne sait jamais à quoi s'attendre
S'il y a déjà participé, il ne sent pas pour autant plus préparés que ses autres concurrents.
"Je connais le large, mais on ne rencontre jamais les mêmes conditions. La météo est différente, le bateau aussi, donc ça ne sera pas la même manière de naviguer. Je ne vais pas faire le même Vendée Globe. Sur certains points ça peut aider, j'ai pu mettre le doigt sur des points que je considérais importants. Après, parfois, la chance du débutant compte. Souvent, les premiers Vendée Globe sont les meilleurs. J'y vais quand même un peu à reculons. C'est une course engageante, physique et mentale. Je ne prends pas le Vendée Globe comme de l'acquis."
Ce qui l'a le plus marqué sur la première édition, c'est surtout d'avoir réussi à terminer la boucle. En effet, ils sont souvent la moitié des participants à y arriver.
"Avec le recul, tous les moments durs sont devenus de bons souvenirs. Je n'ai pas un meilleur moment en particulier, c'est l'ensemble du Vendée Globe qui est gravé en moi à vie."
La victoire en 2024 ?
À tel point qu'Alan aimerait y retourner dans 4 ans, mais pour gagner cette fois-ci !
"C'est un des objectifs de la suite du programme. Mais pour ça, il faut trouver un financement, un bateau et ce n'est pas si simple. J'ai entendu hier soir que le Vendée Globe, c'était la dernière des grandes aventures sur cette terre. Le finir, c'est déjà énorme. C'est la magie de la compétition. Terminer cette course, ce n'est pas anodin, c'est quand même un tour du monde que l'on réalise !"
Vivre une belle expérience sportive et humaine
Quatre ans après sa première participation, Alan souhaite vivre encore une belle aventure.
"J'aimerais vivre la même chose que la dernière fois, mais en mieux. D'abord, une belle expérience sportive. Mais humaine aussi. Parce que c'est une guerre avec soi-même de passer autant de temps tout seul en mer. Il faut être bien dans sa peau et savoir se gérer. On a beau être préparé, tout peut arriver."
Un ancien bateau totalement modifié
Pour cette 2e participation, La Fabrique a investi dans un nouveau bateau. Construit en 2007, il a subi un gros chantier pour le départ.
"On a travaillé sur la structure, l'intérieur, le plan de voilure, le plan de pont pour les manœuvres, on a ajouté des foils pour faire voler le bateau… C'est un pari osé de faire ça sur un vieux bateau. Mais suivant les conditions, ça marche très fort et on maintient les vitesses."
Avec son bateau, il forme un binôme solide. "On est bons dans le gros temps, on se connait par cœur. Je sais où je peux le mener et moi aussi."
Malgré le Covid-19 et les restrictions imposées par le gouvernement, le navigateur suisse a réussi à pas mal naviguer, même si ce n'est jamais assez.
"On est tous touchés de la même manière. Notre état de préparation est identique à celle d'une grande partie de la flotte. On ne part pas exactement comme on le voulait. On devait faire deux transatlantiques qui n'ont pas eu lieu. Le programme a été pas mal modifié, mais on est quand même prêt à partir."
Raconter son histoire
Pour partager son aventure, Alan nous fera partager, jours après jour ce qu'il se passe sur l'eau, ce qu'il vit. "L'aspect communication est important dans notre métier. Il y a des sponsors et on a besoin de retombées médiatiques pour faire vivre nos projets. Je ne vais pas inventer une histoire, mais raconter ce que je vis. Les avaries, les baisses de moral. Certains marins n'arrivent pas à le faire, car c'est révéler son état d'esprit à ses concurrents et leur donner des armes pour prendre le lead, mais c'est la réalité."
Son pronostic pour le podium du Vendée Globe ?
1er Alex Thomson, 2e Thomas Ruyant et 3e Samantha Davies.